Le Prisonnier de l'île aux pécheurs - épisode 8

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Le « Numéro 6 », le personnage principal de la série Le Prisonnier ! Comment ne pas faire le rapprochement ? Bruno était le sixième arrivant sur l’île aux pécheurs ! Hasard ? Il s’en ouvrit à Claire.

– Tu vois des coïncidences partout, répondit-elle. Et puis, tu n’es pas agent secret, à ma connaissance ! Cherche plutôt un moyen de nous faire quitter cette île ! On y a tous réfléchi et on n’a rien trouvé. Toi, l’érudit d’Histoire qui connaît les évasions célèbres, tu ne pourrais pas en transposer une à notre cas ?

Enfin, il la retrouvait expressive, piquante, provocante ! Des traits de caractère qu’elle dissimulait habilement sous un faux air de « excusez-moi de vous déranger ».

– Si on réussissait au moins à contacter l’extérieur, répliqua-t-il. Mais sans téléphone ni connexion internet, il ne nous reste plus qu’à chercher le pigeonnier du domaine.

– Le pigeonnier ?

– Pour accrocher un message à la patte d’un pigeon voyageur !

Elle se mit à rire. Il en profita pour l’observer. Il la trouvait toujours aussi jolie. Ses cheveux bruns mi-longs et ses yeux pétillants lui donnaient un air de Sophie Marceau. Il repensa à l’amour platonique qu’il avait éprouvé pour elle au lycée. Comment avait-il fait pour se contenter d’un tel sentiment ? Pour rester seulement ami avec elle. Pourquoi n’étaient-ils pas sortis ensemble à l’époque, comme la plupart de leurs copains de classe ? Cela restait un mystère.

L’université les avait séparés. Lui était parti en Histoire, elle en Droit, dans des villes éloignées. Ils s’étaient alors perdus de vue. Bruno l’avait presque oubliée. L’adolescent boutonneux était devenu un beau jeune homme. Il avait pris de l’assurance. Entre la licence et l’agrégation, il avait rattrapé le temps perdu avec la gent féminine en collectionnant les conquêtes.

Elle lui avait donné de ses nouvelles au changement de siècle en lui envoyant un faire-part de mariage.

– On n’a pas encore parlé de nous, lui lança Bruno. Comment va ta petite famille ?

Il avait eu envie de lui dire « toujours mariée ? », mais il s’était retenu.

– Ça pousse : Maxence passe le bac cette année. Emma et Louise ont quitté le collège pour le lycée. Ils me manquent. J’étais en déplacement pour la fondation quand on m’a enlevée. Je ne les ai pas vus depuis plus de quinze jours. Ils doivent se demander ce que je suis devenue. Quant à Daniel, il est toujours à fond dans ses tournois de golf.

Elle était donc toujours mariée ! Pourquoi d’ailleurs s’était-il posé la question ? Daniel Lachard, dit Dan Lachard dans le milieu des golfeurs, le successeur de Tigger Woods d’après les initiés. Bruno s’était toujours demandé pourquoi Claire l’avait épousé. Il n’avait peut-être pas l’objectivité pour en juger.

Le champion de golf avait fait trois enfants à Claire. Il lui avait confié la gestion de sa fondation. Sans doute était-elle heureuse de cette existence dorée.

– Il doit, lui aussi, s’inquiéter de ma disparition, poursuivit-elle. Il a dû tout mettre en œuvre pour me retrouver. Faute de nous évader, j’espère que notre salut viendra de ses actions. Et toi ? Toujours célibataire ?

– Oui, répondit Bruno. Ce qui ne veut pas dire une existence monacale.

Elle baissa les yeux. Elle n’avait pas envie qu’il développât.

Ils glissèrent sur des sujets plus anodins avant que Claire ne prenne la décision de partir :

– Il y a une salle de sport à côté de la piscine au bout du bâtiment en sous-sol. Je me discipline à faire un peu de gym chaque matin. Je n’y suis pas allé aujourd’hui, alors je dois t’abandonner.

Il avait envie de lui dire : « je t’accompagne. Ça ne me fera pas de mal, à moi aussi, de faire un peu de sport ». Il se ravisa. À quoi bon lui coller aux basques !

– OK. On mange ensemble ce soir ? J’ai cru comprendre que dans le rituel de l’hôtel, seul le déjeuner était en groupe.

– Non, ce soir je préfère dîner seule dans ma chambre.

Là encore, il n’insista pas. Il était évident que les évènements de 2011 avaient laissé des traces.