Le Prisonnier de l'île aux pécheurs - épisode 34

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Clermont-Ferrand

La lieutenante Perrine Vinay enfila à la hâte son blouson marqué du logo « Police ». C’était la règle quand on partait en intervention. Elle se précipita dans la Peugeot 206. Ne pas faire attendre le capitaine qui l’avait prise au vol avec un « Perrine, magne-toi, on part en inter ! ».

Le véhicule banalisé démarra sur les chapeaux de roues, son gyrophare magnétique collé sur le toit.

– Où va-t-on à cette allure ? demanda Perrine.

– Du côté de Féniers, répondit Roland.

– C’est où, ça ?

– Dans la Creuse, à cent bornes d’ici. Je ne connais pas plus que ça. J’ai rentré les coordonnées dans le GPS. Tu as fini de bosser sur les documents que je t’ai passés ?

– Presque, sauf pour la bible. La doctrine et les règles édictées par ces « soldats », c’est complètement dément ! On se croirait revenu au Moyen-âge. Par contre, j’ai bien intégré toutes les fiches S du dossier. Bon, tu peux me dire maintenant ce qu’on va faire dans la Creuse ?

– Claire Lachard a réapparu dans les radars. J’ai eu l’info grâce à l’indicateur d’alerte. Pour une fois, les relations police-gendarmerie ont bien fonctionné. Elle a passé le week-end dans une propriété des Lachard avec quelques invités.

– Il y a un lien avec les Soldats de la rédemption ? demanda Perrine.

– Oh que oui ! Claire Lachard a cédé à l’effet de mode de ses confrères américains. Elle a tué deux invités dans la matinée et s’est enfuie en emmenant un otage pour se couvrir.

– Mince alors. Tu avais raison en la soupçonnant d’être un élément intégriste de la secte.

– Oui, mais on est un peu à la traîne. Je préfère les interpellations anticipées plutôt que les confirmations après coup. Idem pour le complice de Claire Lachard.

– Elle a un complice ?

– Oui, et tu le connais. Il est aussi dans le dossier. C’est Bruno Martel. Là encore, j’aurais dû anticiper. Sa fiche m’a été présentée deux fois par le logiciel. Pas étonnant que je n’aie pas réussi à le joindre vendredi dernier.

Une heure plus tard, ils arrivaient devant la propriété des Lachard, protégée de l’extérieur par son haut mur d’enceinte. L’imposant portail était ouvert. La Peugeot 206 pénétra dans le domaine. Elle se gara devant la luxueuse demeure au toit en ardoise à côté des deux voitures de gendarmerie déjà sur place.

– Tu as les masques pour se protéger du virus ? demanda Perrine avant d’ouvrir la portière.

– Tu rigoles, répliqua Roland. Pour le moment, ils sont seulement annoncés. Alors en résumé, on y va juste avec notre beau sourire !

Les deux policiers sortirent de la 206. Le capitaine Pichat présenta sa carte barrée de tricolore. Le gendarme en faction devant la porte les laissa entrer.

Le major Cavaignac de la brigade de La Courtine accueillit les arrivants. Après avoir déploré que tous ces gens se soient retrouvés dans ce château en enfreignant les règles actuelles en vigueur, il résuma la situation en la jugeant évidemment plus grave que le non-respect du confinement.

Les témoignages des invités et du personnel concordaient : Daniel Lachard et son épouse avaient convié quelques amis pour le week-end. À part la présence du professeur d’histoire, Bruno Martel, invité de dernière minute par madame Lachard, tous se connaissaient bien.

Dans la matinée, Claire Lachard avait déclamé un discours dogmatique et évoqué la mort comme seule solution pour la rédemption des péchés. Elle s’en était prise violemment à Norbert Destrono et à Ariane Nati. Puis elle avait disparu.

Un peu avant midi, les deux individus menacés avaient été retrouvés morts, l’un défenestré et l’autre vraisemblablement empoisonné.

Le mari avait essayé de maîtriser son épouse, mais Bruno Martel s’était interposé. Claire Lachard et ce dernier avaient alors pris un invité en otage, Renaud Marcellin, et s’étaient enfuis à bord de la Mini Cooper du couple. Daniel Lachard avait immédiatement appelé la gendarmerie.

Le major expliqua qu’il venait de demander d’établir des barrages sur les routes.

Le capitaine Pichat souhaitait interroger certains témoins et en particulier Daniel Lachard. L’officier de gendarmerie donna son accord.