Le Prisonnier de l'île aux pécheurs - épisode 52

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Claire n’en pouvait plus. La douleur à la jambe était trop forte. Elle ne réussirait pas à courir encore très longtemps. Elle devait s’arrêter. Mais il risquait de la rattraper.

Elle passa à côté d’une énorme souche. Un trou, un renfoncement. Elle n’hésita pas une seconde. Elle se jeta derrière le bois mort, se tapit sur le sol et tenta de maîtriser sa respiration pour qu’on ne l’entende pas. Puis elle attendit.

Ce ne fut qu’à cet instant qu’elle réalisa qu’elle pouvait se défendre en ripostant avec le pistolet. Mais où était-il ? Elle ne l’avait plus dans la main. Sa robe ne possédait pas de poches. Elle l’avait perdu. Quelle idiote elle était !

Dan Lachard s’arrêta. Il ne la voyait plus. Il scruta le sous-bois à l’affût du moindre mouvement, du moindre bruit. Elle ne pouvait pas être bien loin. Il posa la main contre son épaule blessée.

La garce ! jura-t-il. Heureusement qu’elle n’a pas pris le temps de viser.

Il était certain qu’elle était quelque part devant lui, cachée derrière un arbre. Il devait la trouver !

Dans son trou, Claire remonta le bas de sa robe. Sa cuisse saignait. Sa blessure s’était rouverte. Elle ne chercha pas à établir un diagnostic plus précis.

Où est-il ? Il n’est pas du genre à abandonner. Il va finir par me trouver si je reste ici. Je dois me relever et repartir. Mais je ne vais pas pouvoir courir bien longtemps.

Soudain, le déclic : la barque !

Courir jusqu’à l’étang ! Il n’est pas très loin. Sauter dans la barque et ramer jusqu’au milieu de l’étang. Se coucher pour éviter les balles. S’il veut me rejoindre, il faudra qu’il vienne me chercher à la nage.

Aucun bruit ne révélait la présence de Daniel. S’était-il éloigné ? Était-il tout proche ? Il fallait se décider.

Claire se releva, regarda rapidement autour d’elle, puis reprit sa course. Selon ses souvenirs de la veille, l’étang devait être là-bas. Oui, c’était ça, la déclivité du terrain le confirmait. La douleur de sa cuisse la rappela à l’ordre. Elle dut s’arrêter. Elle en profita pour se retourner et aperçut Daniel. Il courait dans sa direction en se tenant l’épaule.

Vite ! La barque ! Claire surmonta la douleur et s’élança dans la pente.

Enfin l’étang apparut.

Claire se précipita sur le ponton. La barque était amarrée par une corde à un pieu de bois. Vite, défaire le nœud ! Oh non, trop serré ! Elle n’y arrivait pas.

Daniel était en haut de la pente. Il vit son épouse en train de détacher la corde. Ne pas la laisser partir avec la barque ! Il pointa son arme en direction du ponton et tira. Mais la balle se logea dans un tronc d’arbre.

La détonation affola Claire encore davantage. Et le nœud de cette corde qui ne voulait pas se défaire ! Elle se retourna. Il se rapprochait. Il allait la tirer comme un lapin. Trop tard pour détacher la barque !

Les roseaux ! Se cacher dans les roseaux ! Elle abandonna la corde et sauta dans l’étang. L’eau était glacée, mais ça n’avait aucune importance. Elle fut surprise d’avoir pied. Le fond vaseux la gênait tout de même pour marcher. Elle se jeta en avant et nagea. Les premiers roseaux étaient à quelques mètres. Elle entendit une nouvelle détonation et l’eau gicler à côté d’elle. Plus qu’un mètre !

Elle entra dans la forêt de roseaux. Elle cessa de nager et marcha en écartant les tiges. Enfin, elle n’était plus une cible visible !

Sur le ponton, Dan Lachard regardait l’étendue des plantes aquatiques au milieu desquelles sa femme avait disparu.

Si j’étais à sa place, qu’est-ce que je ferais ? J’avancerais le plus loin possible. Le coin marécageux, là-bas, inaccessible par la berge ! Je suis sûr que tu cherches à l’atteindre, Claire ! Mais ne rêve pas !

Dan Lachard termina de dénouer la corde et sauta dans la barque. Il s’assit, déploya les rames et s’écarta du ponton. Son épaule le rappela à son bon souvenir, mais la rage qui l’habitait était la plus forte.

L’embarcation s’éloigna du rivage et atteignit rapidement la zone de marécage.

Dan Lachard cessa de ramer, se leva et observa les roseaux. La barque tanguait, mais debout, il dominait l’étendue des plantes aquatiques. Il vit bouger les chaumes à une dizaine de mètres devant lui. Cette fois, pas besoin de viser. Il suffisait de tirer là où les roseaux remuaient.

Trois coups de feu retentirent à la suite.

Il baissa son arme et observa.

Plus rien ne bougeait. Il était certain de l’avoir touchée.

Il l’imagina sérieusement blessée. Une agonie qui finirait inévitablement par une noyade !